05 juillet 2014
Histoire des Grandes Régates de Port-Navalo II
ANNEE 1894
La nouvelle cale construite, les Régates peuvent être organisées au départ de Port-Navalo, puisque désormais les bateaux peuvent accoster, manœuvrer à l’abri . Des bouées d’attente sont mouillées dans la rade en toute sécurité.
Nous allons donc ensemble dérouler année après année le film des Grandes Régates , tel qu’il a eu lieu, en s’appuyant sur des documents datés . Ces documents sont des extraits de course, des articles des journaux de l’époque : le Figaro, Ouest-Eclair, le Morbihan., en essayant de les rendre vivants. Et les photos, souvent parleront d’elles-même.
Qu’était la »Plaisance » en Morbihan en 1894 ? Au milieu du 19ème siècle , le Yachting commençe son âge d’or. C’est le temps des grands constructeurs : la famille Fife, à Glasgow, les frères Herreshoff de Boston, Gustave Caillebotte à Paris, artiste peintre talentueux, architecte naval génial et fin régatier, décédé en février 1894 à 45 ans ; enfin, Louis Dyèvre, architecte naval vannetais , créateur du handicap breton qui deviendra par la suite handicap national et qui construisit en 1899 » Maïta », bateau de plaisance de un tonneau, reconstruit au Guip en 1992 par l'Association Arzonnaise Maita. Ces personnalités , pour n’en citer que quelques unes, participèrent au véritable « boom » de l’architecture navale.
…En 1890 le Yachtman Kelley disait « qu ’il fallait beaucoup de temps, de la patience et de solides moyens financiers pour obtenir la quintessence de la pratique du yachting, et il insistait : « il faut beaucoup d’argent et il ne convient pas de le dépenser à contre cœur. Une fois bourse déliée, votre fortune va s’écouler comme de l’eau, tant il est vrai qu’un bon bateau coûte fort cher à construire, encore plus à entretenir, et lorsque vous vous en séparez, ne vaut plus guère qu’une bouchée de pain.. »
(toujours vrai , n'est-il pas ? ndlr)
S'offrir un beau voilier est encore la plus belle récompense que permet la réussite sociale. La Belle Plaisance a aussi existé en presqu'ile de Rhuys. Dans les rapports de course , nous lirons les noms des bateaux, et les retrouverons d’années en années . Beaucoup appartiennent à la bourgeoisie ou aristocratie locale : ainsi les frères de Lobel achètent le fameux « Chocolat » vers 1910 , Alexandre Parent achète le 6 mètres JI » Crusader « en 1914 et le revend en 1928, en 1926 il fait l’acquisition du 8m50 « Pen Breiz » qu’il conserve jusqu’en 1947. Des Arzonnais s’en souviennent . Il y a aussi les propriétaires de Sarzeau : M. Roussin du manoir anglais de Coet y Huel avec Odette, Triton et Folichonne ; Dumoulin de Paillart avec Athos, Diana, Margot I, Ibex, Dis. Il sera maire de Sarzeau et présent sur la pointe de Port-Navalo dans les années 1900 . de Branges, château de Kerthomas avec le 8m50 Joujou avant guerre puis Dianka en 1948.. de Langlais, à la sortie de Sarzeau : Penn Duick I puis un second du même nom ( ce Penn Duick bien que plus petit avait la silhouette du célèbre Pen Duick d’ Eric Tabarly, construit par William Fife en 1898 sous le nom de Yum. Ce n’est qu’en juillet 1935 que son treizième propriétaire Jean Lebec, de Nantes , le baptise Pen Duick. Trois ans plus tard Guy Tabarly s’en porte acquéreur, et une histoire d’amour nait entre son fils Eric et le côtre de William Fife, mais cela est une autre affaire...) Bref, le Penn Duick I de de Langlais a été construit en 1892 aux chantiers Texier à Genevilliers,et sera revendu en 1896. Le second suivra .
La pratique du Yachting en Morbihan comme ailleurs , n’est pas réservé qu’à une élite, ce divertissement était largement partagé et il y avait toujours foule au bord de l’eau pour admirer en famille le spectacle captivant des régates où se disputaient de prestigieux trophés. Les Régates de Port-Navalo invitaient tout le monde, hommes, femmes, capitaines, marins, pêcheurs , régatiers confirmés ou amateurs du dimanche, et le spectacle magnifique des bateaux de prestige , à côté de barques à voiles, sinagots, et autres embarcations était la preuve vivante de la fraternité du monde de la mer unis dans la même passion .
A terre , il en était de même .Tôt le matin , des navires à vapeurs venant de Vannes, via Baden, ou venant de Belle Ile par la Compagnie Vannetaise de navigation déversaient sur la jetée toute neuve des flots de passagers qui très vite envahissent le terre plein et la promenade du phare jusqu’à la plage. A l’époque pas de maison , pas d’arbres sur cette promenade; juste le phare , ses deux tours posées sur la lande et puis la foule se dispersant jusqu’au fortin – face au belvédère actuel - où flotte le drapeau de la ligne de départ et d’arrivée dans l’alignement de Kerpenhir.
Tout le monde est sur son 31 , hommes cravatés, vestes à feston, coiffés de canotiers, cannes à pommeau, portant dans des paniers d’osiers le nécessaire à pique-nique et les précieuses bouteilles..
Femmes élégantes , chapeaux fleuris rivalisant d’audace car parfois il y a du vent , crinolines et dentelles à profusion, ombrelles, bottines à boutons et puis des marinières, des coiffes bretonnes , de la bonne humeur pour tout le monde, la musique locale ou venue d’ailleurs pour l'occasion, se chargeant si besoin de chauffer l’ambiance .
le 22 juin 1894 , Prix spécial de l’Union des Yachts Français , organisé par la SRV.
Engagés : Alpha( 0,85 T ) à M. de Thézac, Odette(0,98) à M.Roussin, Tutu(0,46) à M.Normand, Vézon(0,59) et Tracassin (0,65) à M.Levesque, Alcyon (0,57) à M. Jouan, Congo(0,50)à M.Balmain, Turlututu(0,24) à M Laroche, Margot(0,99) à M Dumoulin de Paillart, Pitchoun( 0,24)à M.Bouêssel
Ordre d’arrivée de la 1ère épreuve Alpha, Odette, Tutu, Vezon,Tracassin, Alcyon,Congo,
2ème épreuve : Tutu , Alpha, Odette, Vezon, Tracassin, Congo
La 3ème épreuve a été courue en match par les 2 vainqueurs précédents , le prix reste à Tutu ( 3 jours après sa mise à l’eau) fin-keel grée en houari, arrivé 15 secondes avant Alpha !
Le 30 juin 1894, la SRV donne le départ des Régates Internationales de Port–Navalo.
« A 11h45, le pavillon de l’Union est amené pour l’ouverture de la ligne et les 23 yachts engagés profitant du jusant qui double leur vitesse, gagnent rapidement le large malgré la faible brise. Le ciel s’est dégagé sous un léger vent de nord ouest, la mer est plate .
Le parcours de 20 milles comporte un petit largue suivi de 2 « plus près », d’un vent arrière et d’un grand largue pour terminer.
« Des torpilleurs et des steam-yachts remplis de passagers évoluent autour des yachts »
« Des le milieu du parcours, Guimili, Margaret, Simone et Mylio prennent une belle avance. Les honneurs de la journée appartiennent à Simone ( dont c’est une des premières sorties en mer.) qui bat Margaret de 3 minutes en temps compensé.
Dans la catégorie des plus de 10 tonneaux, Margaret est première devant Guimili. »
à suivre............
HJ
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Catherine